Secret Inviolable
Une petite flaque bleue
Qui s’étale en une fleur,
Un myosotis d’encre.

De l’eau dans ses yeux,
Reflet de son cœur
Brisé en silence.

Juste l’impuissance, qui l’enchaîne ;
Destin sordide pour une jouvence envolée,
Arrachée par une conscience malsaine…
Il n’y avait qu’à se résigner.

Visage de petite fille
Devenue adulte bien trop tôt.
Impossible, même, de dire ce qui la vrille :
Personne, oui personne, ne croirait ses mots.

Dieu n’existe pas.

C'est la même chose pour tout le monde...
Il y a des sourires que l'on perd,
Et qu'on ne retrouve jamais...
Ce ne sont que de petites descentes aux Enfers
Que chacun veut dissimuler...
Des choses simples, voire ordinaires.
Mais ce sont elles qui nous font déraisonner.
Quelques malheurs naïfs:
Enterrements, ruptures, pertes...
Ces banals événements suffisent
A briser masques et faux semblants... Indigestes.

Cette ironie de l’altruisme
Un vide immense qui résonne dans ma tête,
Dans mon cœur et tout mon être.
Quelques brusques accès de solitude
Où mes larmes coulent.
Des larmes remplies d’amertume.

J’ai besoin de me confier.
Ou je finirai par me détruire.
Mais je n’ose pas en parler,
Jeter mon masque
Et troubler leur sourire

Je me sens mal, inexistante ou invisible.
Pourtant je ne peux briser leur illusion,
Celle d’une fille heureuse de vivre.
En vérité je me déteste.
Je ne suis qu’un mensonge.

Il y a des gens qui sont irremplaçables.
Mais pas moi, je n’y crois pas.
Je ne suis qu’un morceau d’argile malléable,
Destiné à redevenir poussières
Ou cendres, au choix. C’est un cri égoïste !
Je ne suis pas raisonnable. Et je le sais.
Je ne fais que me plaindre sans arrêt.
Ce n’est pas une excuse d’être triste,
Pardon d’être pathétique..

ATTENDS!!
ATTENDS!!
Ce n'est pas juste! Je ne veux pas!
Pourquoi es-tu parti sans moi?
Je vais pleurer, tu le sais bien...
Veux-tu donc que je me consume de chagrin?
Tu avais promis de m'emmener,
Qu'on ne se quitterait jamais...
Au final, tu m'as complètement oubliée.
Sur la berge, je te faisais de grands signes, et toi,
Tu m'as ordonné de rester là.
Je t'en veux, un peu, il me semble.
Parce que nous n'avons pu demeurer ensemble
Pour ce long voyage.
Et moi qui, depuis ce jour, essaie d'être sage,
Je fais bonne figure devant ces gens,
Qui sont venus docilement
A ton enterrement.

Disgrâce
Tristes souvenirs,

Et sombre avenir…

La colombe a perdu ses ailes,

Le rameau vert est tombé ;

Plus d’Espoir ni d’Eternel à prêcher.

C’est comme ça
Y’a des jours où j’veux tout claquer.
Des jours de déprime, moi aussi j’y arrive.
Cette fois-là, un ressort a cassé,
C’était une rage et une tristesse maladive.

Personne n’y comprenait rien,
On n’a pas cherché à comprendre,
On m’a laissée jusqu’au lendemain.
Moi, je voulais me pendre.

Finalement, personne n’est fort.
Pour compter sur quelqu’un, y’a personne de valable.
Pour les autres, nul n’est irremplaçable.
On est seul pour notre sort.

Just... like everyone
Enfant, ne pleure pas.
Il y a dans tes yeux un peu d'espièglerie
Et beaucoup de tristesse.
Devant nous, tu plaisantes et tu ris;
Au loin, se libèrent tes faiblesses.

Enfant, ne t'isole pas.
Tes sourires sont comme des barrières
Protégeant ton coeur...
Mais chaque fois que tu arbores un air fier,
Au fond, tu cries une douleur.

Enfant, ne pleure plus.
Accepte de te reposer sur nos épaules,
Hurle et insurge-toi! C'est humain tu sais...
Jamais, on ne te fera de reproches.
Et quand ça sera si douloureux que tu garderas le silence,
On sera à tes côtés.

Course éternelle
Une prison sans porte ni fenêtre
Et sur le sol, des larmes qui s'écrasent.
Un monde blanc, composé de "peut-être",
De mensonge et patience qui s'embrasent.


*


La peur des moqueries:
Les enfants sont cruels.
Dans cette solitude je prie
A la recherche d'une étincelle.


*


Quête du savoir, crainte de l'ignorance.
Besoin insatiable contre l'innocence.
Feuille vierge éternelle où, petit à petit,
Les mots s'écrivent puis s'effacent... à l'infini.

Amnésie
Comment te le dire?
Je vais faire simple;
Je ne veux pas te mentir.

J'ai tout oublié.
De nos caresses, de nos baisers.
De tes murmures, nos aventures,
Envolés.

Je ne sais même plus qui je suis,
A qui jouer, pour qui pleurer?
Je ne me souviens de rien.
De toi encore moins.

Je ne veux pas faire semblant.
Lâche ma main, je t'en prie.
Tout cela n'a plus de sens.
Grotesque comédie.

Je vais me laisser tomber dans cet abîme.
Je vais me débattre, même infirme.
Laisse moi voler.
Me retrouver.

Neige au soleil
Ne cherche pas à comprendre,
Ne cherche pas de raison.
Je voulais que tu saches ce que je pense,
Pas écouter ton sermont.

Sans doute que je suis orgueilleuse,
C’est mon précepte de base.
Si je n’étais pas capricieuse,
Je m’écroulerais comme du sable.

Pas de convictions,
Pas de désirs.
Tout m’a été pris,
Tout me fut volé.
Je veux fermer les yeux,

Adieu…

Parfois, il n’y a pas de plus terrible réponse que le silence. Et c’était tout ce qui lui restait à ce moment-là : le silence et la clameur étourdissante des rues.

Le portable avait vibré dans la poche de John. Plusieurs fois de suite, avec insistance. Si cela avait été Harriett ou quelqu’un d’autre, il aurait été probable qu’il ne décroche pas, qu’il ne regarde même pas l’écran et raccroche directement. Et alors peut-être, oui peut-être, que les choses se seraient passées autrement… Peut-être seulement. Car il y avait une maigre consolation à se dire que ça n’avait pas été un choix arrêté de la part du détective de finir ainsi… Si maigre consolation…
Sauf que le numéro qui s’était affiché était celui de Sarah.

Quand il était parti, Sherlock lui avait adressé un de ces demi-sourires qui lui étaient si propres, sans rien dire, juste avec un hochement de tête pour signifier qu’il comprenait… Et John l’avait laissé derrière lui, sur la terrasse du Bart’s. Tout au sommet.

Oui… Ils s’étaient quittés exactement comme cela : sans un mot, sans un au revoir, comme d’habitude. Pas besoin de se justifier à chaque absentéisme, n’est-ce pas ? Ils étaient adultes, responsables, et au fond, pas nécessairement dépendants l’un de l’autre… Et pourtant, pourtant, jamais auparavant le médecin n’avait autant eu cette sensation d’avoir une plaie béante dans la poitrine, comme si on avait arraché une partie de son être.

-Sherlock ! SHERLOCK !...

Seuls les vrombissements des voitures en contrebas se faisaient entendre ; et non pas la voix désirée. Le vent sec et froid fouettait son visage, glacial, comme la sensation qui s’était emparée de son esprit au fur et à mesure que le médecin comprenait.
Des morts, John en avait vu. Il les avait affrontées bravement, en faisant face, parce que là-bas, dans la poussière de l’Afghanistan, la guerre ne nous laissait pas pleurer les pertes. Lorsqu’un camarade tombait, il n’y avait pas le temps de larmoyer, il fallait continuer, comme hier, aujourd’hui et demain. Mais ici, ces préceptes, ces fondations solides qu’un militaire eut pu acquérir ne tenaient plus. Plus rien ne permettait de rester debout devant la disparition du plus cher, du plus intrépide, du meilleur des amis.

Sa main tremblait, sa jambe cédait, et cette fois-ci, les champs de bataille n’y étaient pour rien.

Qu’est-ce que John éprouvait dans le fond ? De la peine, des remords, des regrets ? Du désespoir ? Quelque chose qui le ruinait en tout cas. Un tout où se mêlait larmes, cris et douleur. Un tout qui ne ramènerait pas cet homme qui se disait sociopathe mais qui en vérité, ne voulait simplement pas faiblir sous les yeux de ceux qui croyaient en lui.
Cet enfant aux yeux et au cœur plus altruistes que n’importe quel adulte.

Au moment où il avait aperçu Sarah qui riait derrière la baie vitrée du cabinet, il avait compris qu’il s’était jeté tête baissée dans le piège… Le piège de Jim Moriarty. Le plus célèbre, l’unique et renommé criminel consultant. L’égal, non ! la Nemesis de Sherlock Holmes… Il avait compris cela et aussi, aussi… que Sherlock le savait. Il le savait et ne l’avait pas retenu, pas averti, n’avait rien laissé paraître. Pour ne pas l’inquiéter ? Oui, et même si c’était l’exact contraire de ses habituels actes égoïstes, cela lui ressemblait. Ne pas prévenir, c’était encore et toujours du théâtral. Ce théâtral que Sherlock affectionnait tant…

Les doigts fébriles du médecin heurtèrent un objet dur parterre. Dur et plat. L’ordinateur du détective. Sa base de données. John s’en souvenait parfaitement, son ami, son compagnon, son maître –oui, son maître !- avait tenu à l’emporter ce matin là, parce que « pour traquer un Napoléon du crime, un smartphone ne suffit pas, trop peu performant pour bien s’organiser. »

C’était une page Word qui était ouverte. Et ce qui y était écrit s’adressait au Docteur.

Ainsi donc, le sociopathe, celui qui prétendait savoir qu’il ne possédait pas de cœur avait pu lui laisser un mot… ? Et lui, lui n’avait même pas pu échanger une dernière parole.

Pour dire quoi ?

« Salut ! Content de t’avoir connu, on se retrouve au Paradis ! » ?

Des mots sans tristesse, avec juste beaucoup, beaucoup de tendresse. Des mots où il savait être désinvolte, comme toujours, des mots simples mais qui amenait à la terrible vérité, celle que John refusait de voir, refusait d’admettre.

Sherlock et Moriarty. Les géniaux détective et criminel consultants luttant ensemble, jusqu’à chuter du haut de l’immeuble, de l’hôpital. Et cela, même John était capable de le déduire.

Sherlock…

Etait-ce vraiment là la délivrance qu’il attendait ? Lui qui répétait s’ennuyer, dépérir ; lui qui, sans rien savoir de l’amour, avait aimé tant de gens ; était-ce donc à cette fin qu’il aspirait ?

Prostré, le Docteur n’était plus qu’un homme prostré qui pleurait un frère, un frère dont il aurait voulu tout partagé, avec qui il avait tout partagé… Sans qu’il y ait d’égal partage en retour. Non pas parce que Sherlock ne faisait pas d’effort, mais parce qu’il pensait trop aux autres. Ses tourments, ses blessures… Il avait toujours été un excellent acteur alors ça n’avait pas été trop difficile à cacher. Pour ne pas les inquiéter, ne pas attirer l’attention sur lui… Non, même si il était excentrique, l’attention, cette Lilith ambigüe, ne devait être reportée que sur son travail. Son travail pour sauver Londoniens et monde entier…

Holmes, Sherlock Holmes…

Animal inaccessible et au regard bienveillant, dont le fond de la pupille avait cette étincelle de souffrance et de solitude, qui brillait, si fort, si fort…

Hurler jusqu’à ne plus avoir de voix, hurler bien qu’on sait que ça ne fera pas ressurgir cet homme à la silhouette haute et dégingandée, aux yeux semblables à deux pierres de lune –un bleu délavé, perçant, incisif…- , hurler que les cadavres ne seront plus battus, que plus aucun coup de feu ne résonnera dans le meublé de Baker Street, plus de nuits blanches et de courses poursuites…

Plus personne pour vivre et non pas seulement survivre.

Plusieurs mètres plus bas, sur le trottoir gris s’élargissait une flaque de sang, comme une fleur pourpre, sous deux corps enlacés.

« John, John… C’est toi qui cries ainsi, pareil qu’un loup à l’astre nocturne ? »

-SHERLOCK !!...

« Pardon John, pardon. Je voudrais tout te dire, je voudrais te répondre… Mais je ne peux pas. Pas maintenant. Un jour je t’expliquerais tout… Ce jour viendra je te le promets...»

Des ténèbres et une subsistance de conscience. Pour le seul, l’irremplaçable ami qui avait su l’apprivoiser…

« Annonce-la John. Annonce à toute la Terre ma mort, explose le nombre de vues de ton blog… Pour que les gens ne compatissent pas à la chute d’un simple conseiller de police mais aux larmes salées du plus fidèle des camarades, un camarade un peu naïf mais le plus brave, le plus aimant des amis. Et travaille John, travaille pour ne pas sombrer : Car le travail est le meilleur antidote au chagrin. A bientôt…»

Dans un coin, un petit être recroquevillé.

Les passants marchent et le dépassent sans lui jeter un coup d'oeil, sans même le voir. Il fait froid et une flaque de verglas s'est, ce matin, étendue à travers la ville. Les gens sont emmitouflés dans leurs épais manteaux de fourrure; certains se hâtent, empressés de retourner au chaud dans leur foyer, quelques uns ont le malheur de poser le talon sur les parcelles givrées du trottoir et glissent douloureusement sur le bétume. Il fait froid et personne ne remarque cette petite fille aux genous noueux qui tremble sans rien sur les épaules. Ses mains osseuses enserrent fébrilement un corps maigrelet tandis que le vent fouette son visage blême en emmêlant une pauvre touffe de cheveux sales, ternes et graisseux.

On ne la connaissait pas.
On l'oublie.
Et elle disparaîtra.

Les lumières scintillent dans les rues, halos de gaieté dans les yeux des riverains. Ils sont pressés, ils ne s'attardent que peu, voire pas. La plupart porte sous ses bras multitude de paquets, sacs, avec à l'intérieur, peut-être, une dinde surgelée. Les voitures vrombissent, éclaboussent les devantures peinturlurées des magasins. Le sel a fait fondre la neige sur l'asphalte, enfouissant le goudron sous une fine couche de boue. Des enfants jouent avec, chantant ou riant. Joyeusement. Et elle ouvre de grands yeux, des yeux gris, un peu vitreux qui s'enfoncent dans leur orbite. On dirait un animal. Mais le monde s'en fout, ce ne sont pas ses affaires, il y a d'autres chats à fouetter.

Elle n'a plus de passé.
Son présent est un tas de ruines.
Et son futur n'existe pas.

Peut-être qu'un jour, avec un peu de chance, un proxénète la recrutera, ça vaudra toujours mieux que de rester ainsi. En fait, même à cela, elle a renoncé. Cela fait quoi? Longtemps, trop longtemps qu'elle observe, qu'elle attend. En silence. La seule chose dont elle soit encore consciente, c'est le bruit des semelles en cuir qui tapent sur le pavé; même la faim ne compte plus. Elle a perdu la notion du temps et ses pensée sont vides. A quoi bon...? Qu'est-elle? Juste une souillon qui fait partie intégrante du paysage. Juste une crevarde de plus sur cette Terre. Est-elle encore humaine? Non. Non, certainement pas. Les gens de la rue perdent leur humainté en même temps que leur condition et leur situation. C'est comme ça.

Enfin, elle ferme les yeux.
Elle s'est, de toute façon, résignée.
Et elle espère que pour Noël, on lui accordera une ultime grâce au Paradis.

Abandon
Sol glacé sous un corps étendu,
Poupée de cire brisée et perdue,
Qui compte en silence les étoiles du monde.

Course effrénée, sablier vidé,
Larmes coulant d’un regard figé,
Trahissent le regret éternel puis tombent.

Et cette fleur fanée posée sur la commode
Peint d’un rouge sang le verre des carreaux,
Tandis que la flamme d’une bougie achève son ode,
Puis s’éteint plaintivement, soufflée par la Faux.